
Dans un bouleversement inattendu sur la scène politique de Lubumbashi, le Conseil d’État de la République démocratique du Congo a décidé de suspendre l’arrêté ministériel du 27 février 2025, qui avait désigné Patrick Kafwimbi en tant que maire intérimaire de la ville. Cette décision fait suite à une requête déposée par Joyce Tunda Kazadi, la maire adjointe légalement investie par ordonnance présidentielle, qui avait jusqu’alors exercé l’intérim. Ce revirement, dans un contexte déjà chargé de tensions administratives, soulève des questions essentielles sur la légalité des nominations au sein des entités territoriales décentralisées.

Le Conseil d’État, dans son jugement, souligne une « violation manifeste » de l’article 126 de la loi de 2008 sur les entités territoriales, ainsi que du décret-loi de 1998 régissant les procédures de nomination dans l’administration locale. Selon cette haute juridiction, la désignation de Kafwimbi repose sur des bases juridiques fragiles et a été réalisée en dehors des procédures établies. Ces procédures stipulent que seul le Président de la République, sur proposition du ministre de l’Intérieur, détient le pouvoir de nommer les autorités urbaines. Par conséquent, l’arrêté contesté est suspendu avec effet immédiat, rétablissant de facto Joyce Tunda dans ses fonctions intérimaires à la tête de la mairie.

Cette situation soulève des interrogations profondes sur la rigueur des processus administratifs en vigueur. Comment une nomination aussi cruciale a-t-elle pu être signée sans une vérification adéquate de sa conformité aux textes légaux ? Ce flou, qui pourrait s’apparenter à une manipulation politique, semble avoir induit en erreur le cabinet du vice-premier ministre de l’Intérieur. L’incertitude qui en découle ouvre la voie à des spéculations sur les véritables motivations derrière cette décision précipitée, surtout que Kafwimbi et Tunda sont tous deux des figures de proue de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), le parti au pouvoir. Cela confère à cette affaire une dimension politique indéniable.

La décision du Conseil d’État ne se limite pas à une simple correction administrative ; elle met en lumière certaines pratiques arbitraires dans la gestion des entités territoriales et renforce le rôle de la justice administrative en tant que gardienne de la légalité des actes exécutifs. Ce rebondissement pourrait établir un précédent important pour d’autres conflits similaires à travers le pays. À Lubumbashi, tous les regards se tournent désormais vers la réaction du ministère de l’Intérieur, qui se voit contraint de réévaluer ses décisions, ainsi que vers la mairie, où la reprise de pouvoir par Joyce Tunda s’annonce à la fois symbolique et stratégique dans un paysage politique local en pleine mutation.